Le numérique, ce n'est pas seulement des codes, des automates, des serveurs, des réseaux, des PC, des langages, des logiciels, c'est aussi des compétences, des réseaux sociaux, des communautés, des normes, des identités, des traces, des diffusions, des processus, des architectures, des classements, des indexations, des scoring, des interactions, des narcissismes, des fictions, des attaques, des protections, des choix, des budgets, des politiques, des rémunérations …
Quand l'innovation « disruptive » impose sa loi à l'économie
Innovations disruptivesSteve
Jobs, que l'on voit ici présentant la première version de l'iPhone, le 9
janvier 2007, est le visionnaire qui a déclenché la révolution des
applications mobiles dont on continue à mesurer l'ampleur planétaire./
DR
C'est une des facettes fondamentales de l'entrepreneuriat : apporter
un service nouveau qui suscite de nouveaux usages et transforme le
marché en profondeur avec des modèles économiques radicalement
différents. Ces innovations « disruptives », qui bousculent les
positions dominantes, sont en passe de changer les systèmes de valeur
dans l'économie capitaliste. La preuve en cinq exemples.
Mais, qui se souvient de leurs inventeurs ? En revanche,
chacun de nous connaît Steve Jobs. Qu'a-t-il inventé ? Pas l'écran
tactile, ni les batteries pour smartphone, ni le GPS. Pourtant, le 9
janvier 2007, lorsqu'il a présenté pour la première fois l'iPhone et son
écosystème composé d'iTunes pour télécharger musique et vidéos et de
l'AppStore pour les applications... tous les smartphones du monde ont
pris un sacré coup de vieux. Normal : l'iPhone a d'emblée suscité des
usages que les consommateurs se sont immédiatement appropriés. Du
téléphone, on est passé à la culture connectée.
En quelques années,
Apple aura écrasé Nokia et Blackberry, pourtant leaders à l'époque.
Pendant ce temps, la firme à la pomme est devenue la première
capitalisation boursière du monde.
Grâce à Steve Jobs, Jan Koum a réussi,
voici quelques jours, le « coup » de l'année en vendant à Mark
Zuckerberg (Facebook) pour 19 milliards de dollars son application de
messagerie WhatsApp - 450 millions d'utilisateurs - qui bouscule le marché du mobile
; Mark Zuckerberg, un autre disrupteur qui a fait basculer Internet à
l'heure du partage 2.0... Morale de l'histoire, selon Clayton M.
Christensen : la « disruption » tient davantage du modèle
économique que de l'innovation technologique. On parle alors
d'innovation disruptive. Le « disrupteur » est celui qui déboule sur un
marché aux situations établies et le bouleverse avec une proposition de
valeur inédite. Avec beaucoup d'intuition, voire une sacrée dose
d'irrationnel, il va flairer, assembler, combiner des technologies et
trouver le moyen de répondre à une demande qui s'ignore elle-même. Et
développer un système cohérent qui pourra se déployer rapidement à
l'échelle mondiale. Bref, le disrupteur crée, impose, ébranle et
transforme un marché.
Le phénomène ne date pas d'hier. L'Autrichien Joseph Aloys
Schumpeter, qui s'est fait connaître en 1911 avec la publication de sa
Théorie de l'évolution économique, décrit déjà notre disrupteur comme un
entrepreneur qui veut introduire une combinaison nouvelle, propre à
perturber tout le système, à renverser l'échelle des valeurs. Schumpeter
formalise ainsi le concept de « processus de destruction créatrice ».
Une génération de la création de valeur
Un siècle plus tard, une chose est sûre : l'innovation
disruptive est en train de s'imposer comme la règle, cruelle et brutale,
du capitalisme. Les taxis parisiens protestent en faisant grève contre
les véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC), type Uber. Les hôteliers
dénoncent les plates-formes d'hébergement à domicile, les banquiers
voient d'un mauvais oeil le crowdfunding et les nouvelles monnaies
cryptographiques (comme Bitcoin). En un mot, les modèles établis veulent
conserver leur place au soleil, c'est naturel, mais ne peuvent pas se
battre avec les mêmes armes que celles des nouveaux entrants.
De fait, les premiers croulent sous les réglementations, les
frais de structure, l'immédiateté du marché à servir, les résultats
financiers à assurer, les emplois à sauvegarder... Alors ils tentent de
faire pression sur les gouvernements pour freiner à coup de
réglementations la marche des disrupteurs. Pas toujours très efficace
et, surtout, très risqué à terme. Ils peuvent aussi les imiter afin de
rafler les parts de marché qui restent à prendre, en espérant profiter
de l'augmentation de la taille du gâteau. Ou encore, sous peine de
mourir, racheter les nouveaux venus, s'ils en ont les moyens, ce qui
n'est pas donné à tous, n'est pas Facebook qui veut...
L'innovation disruptive est un processus sans doute
irréversible et indispensable pour renouveler la création de valeur.
Pour affronter cette nouvelle donne, il n'y a pas de recette toute
faite. La meilleure réponse est sans doute celle expérimentée par les
grands groupes : parier à fond sur l'innovation participative,
l'innovation ouverte (« open innovation »), l'innovation intensive, les
Internal Ventures (start-up internes)... et les pôles de compétitivité
où les entreprises côtoient les laboratoires de recherche ainsi que les
start-up. Au final, la dose de folie et la rapidité nécessaires pour «
disrupter » ne sont plus l'apanage ni des « startupers » ni des grands
groupes. C'est une affaire de personnalité.
En témoigne Satya Nadella, le nouveau président de Microsoft,
lorsqu'il dit : « Notre industrie ne respecte pas la tradition, elle
respecte seulement l'innovation. »
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Le "bed and breakfast" qui bouscule l'hotellerie !
En 2007, loin d'arborer le sourire franc et confiant qu'il
affiche aujourd'hui sur toutes les télés, Brian Chesky n'est qu'un
designer de 26 ans au chômage. Ses poches sont vides mais son
imagination débordante.
Un colloque de design va se tenir près de chez lui, à San
Francisco (Californie) et tous les hôtels affichent complet. Brian et
son colocataire Joe Gabbia décident alors d'héberger des visiteurs,
histoire de renflouer leur compte en banque.
« La créativité résout tous les problèmes. On me l'a souvent répété à
l'université, se souvient-il. En trente minutes, nous avons construit
un site Internet sommaire avec des photos de notre appartement. »
Amol, venu d'Inde, Katherine, de Boston, et Michael dorment
ainsi sur un matelas pneumatique (Airbed, en anglais) dans le salon des
deux amis, pour environ 70 dollars. Airbedand-breakfast, plus simplement
Airbnb, est né. Y-Combinator, une entreprise de financement de
start-up, investit 20.000 dollars (14.680 euros) dans la société qui
grandit rapidement.
En mars 2009, Sequoia Capital, une entreprise de
capital-risque, injecte 600000 dollars (440.000 euros). L'entreprise ne
révèle pas ses chiffres mais les experts estiment qu'elle générerait
plus d'1 milliard de dollars par an !
Airbnb propose à la location presque 150.000 logements dans
34.000 villes. Dont un grand appartement à Brooklyn, où Garance, 24 ans,
a séjourné quatre jours en octobre dernier avec son mari et sa fille de
2 ans :
« À New York, les hôtels sont hors de prix. Notre appartement était
très abordable : 40 euros la nuit, ménage inclus. L'avantage, avec un
enfant, c'est qu'on a le même rythme de vie qu'à la maison. »
Après le séjour, les visiteurs donnent une note et une appréciation via le site.
« On peut savoir si les propriétaires répondent vite aux mails ou si l'appartement était propre », reprend Garance.
Si l'inscription sur le site est gratuite, Airbnb prélève
12% à chaque transaction : 3% sur les revenus de l'hôte et 9% sur le
client. Leader du marché, le modèle d'Airbnb a inspiré d'autres
démarches. Citons ainsi Couchsurfing qui propose des hébergements
gratuits. En revanche, l'inscription au site est payante. Quant au site
Homelidays, il fonctionne sur un système d'abonnement.
« Le propriétaire paie des frais d'insertion. Ensuite, tout est
entièrement gratuit pour le voyageur », explique Cyrille Coiffet,
porte-parole du groupe.
"Ces locations échappent aux contraintes de la loi"
Pour sa part, PAP Vacances affiche de plus longs séjours, souvent hors zones urbaines.
« Nous proposons aussi des contrats d'assurance annulation ou
anti-fraude ainsi qu'un conseil juridique, pour plus de sécurité »,
ajoute Jean-Michel Guérin, directeur général de Particulier à
Particulier.
Des services, parfois utiles, qui cherchent à pallier les
arnaques où des propriétaires fictifs encaissent les loyers de vrais
vacanciers ! On s'en doute, le secteur hôtelier fulmine.
« Ces locations échappent aux contraintes imposées par la loi en
matière d'hygiène, de sécurité et de fiscalité, affirme Laurent Duc,
président de la branche hôtellerie de l'Union des métiers et des
industries de l'hôtellerie (UMIH). Nous opérons le même commerce mais
nous n'avons pas les mêmes obligations. Ce n'est pas normal. »
Certains propriétaires achètent même des appartements pour les louer exclusivement via Airbnb.
« L'économie collaborative doit être encadrée, reprend Laurent Duc.
La location sur la base d'une nuit n'est pas acceptable. Il faut laisser
à l'hôtellerie les logements de très courte durée. »
En attendant d'aboutir à un accord, de nombreux vacanciers
continuent de louer un hébergement sur un bout de canapé, dans un igloo,
un bateau ou un château.
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Les VTC, meilleurs ennemis des taxis
Que se passe-t-il lorsque deux entrepreneurs en série
californiens se rencontrent à LeWeb, en 2008 à Paris ? Ils découvrent
nos taxis. Ils échangent des histoires sur leurs mauvaises expériences
et phosphorent sur une solution technique pour avoir un chauffeur à
disposition. Facilement.
Au départ, Garret Camp et Travis Kalanick s'orientent vers
un service de limousine en temps partagé. Un an plus tard, nos deux
compères lancent à San Francisco, Uber. La première offre de véhicule de
tourisme avec chauffeur (VTC) moderne venait de naître. L'histoire se
répète en France. Yanis Kiansky, ex-consultant chez SAP, le leader
mondial du progiciel de gestion, ébauche en 2011 AlloCab en discutant
avec les motos-taxis qu'il emprunte souvent. Il leur propose un outil de
coordination et de gestion des courses.
En 2012, Yves Weisselberger, alors à la tête de KDS, une
société aidant les entreprises à organiser les déplacements de leurs
salariés via Internet, a l'idée d'utiliser ces mêmes outils pour la
réservation de voitures et lance SnapCar. Derrière chaque service de VTC
se cachent des ingénieurs voulant améliorer « l'expérience client ». Les centrales de réservation malmenées
« En 2012, les taxis fonctionnaient à peu près comme dans les années
1950. Avec très peu de technologie », explique Yves Weisselberger.
Chaque plate-forme de VTC offre des applications pour
smartphone aux passagers ainsi qu'aux chauffeurs pour réserver
facilement un véhicule, voire d'une simple pression chez SnapCar, la
géolocaliser et payer la course à l'avance.
Plus que les services annexes (bouteille d'eau, recharge de mobiles),
ces innovations mettent « la voiture avec chauffeur au même prix que
les taxis. En fait, plus chère que les taxis hélés dans la rue mais
moins chère que les taxis commandés à l'avance, calcule Yves
Weisselberger. La technologie est en train de faire exploser, à une
rapidité que je n'ai jamais vue, tout un système : celui des grandes
centrales de réservation de taxis. »
La réaction ne se fait pas attendre. Grèves massives des
taxis, menaces de centrales de réservation, comme Taxis G7, Taxis Bleus
(qui appartiennent à Taxis G7), pour interdire aux chauffeurs affiliés
d'utiliser des plates-formes alternatives, le service de covoiturage
entre particuliers UberPOP payable avec un compte PayPal...
« Nicolas Rousselet [le patron de Taxis G7, ndlr] indique que sa part
de marché n'a pas bougé en 2013. Preuve que notre concurrence ne
l'affecte pas, commente Yanis Kiansky. Le fond du problème, c'est que
les chauffeurs de taxi achètent très cher deux droits opposés : la
maraude sur la chaussée via la plaque et les réservations par radio avec
les centrales qui leur imposent des restrictions très importantes. »
Les taxis doivent-ils forcément considérer le VTC comme ennemie ? Taxis G7 n'a pas souhaité répondre à nos questions.
« Il faut que les chauffeurs de taxi adoptent les nouvelles
technologies et qu'ils se libèrent du joug des centrales radio pour se
battre à armes égales avec le VTC, souligne Pierre Peyrard, responsable
de Taxiloc, qui met en relation taxis et clients via une application
mobile ou le Web. Sur la question des charges, il faut que la
réglementation évolue. Le statut d'autoentrepreneur ne convient pas au
VTC et incite les chauffeurs à l'évasion fiscale par le racolage. »
La décision du gouvernement, le 8 février dernier, de nommer
un médiateur pour trouver des conditions de concurrence équitable entre
les deux services n'a pas désamorcé le conflit. Depuis le 13 février,
le gouvernement a gelé durant deux mois les immatriculations de
chauffeurs VTC durant la médiation.
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Les monnaies digitales changent la donne
Quoi de plus régalien que de frapper
monnaie ? C'est ce bastion du pouvoir qu'ébranle Nakamoto, personnage
totalement fictif et mystérieux qui a créé en 2009 le bitcoin, une
monnaie électronique virtuelle au succès aujourd'hui planétaire, bien
que décrié en raison, entre autres, de la spéculation qui y est liée :
après avoir dépassé les 1.200 dollars début décembre 2013, il
s'échangeait à la fin de février autour de 600 dollars, avant de
s'effondrer, à la suite du piratage d'un serveur-hébergeur (MtGox).
Point fort, le bitcoin se base sur un algorithme
cryptographique ultra-sophistiqué, d'où l'appellation de cryptomonnaie,
ainsi que sur la création d'unités de valeur monétaire en faisant
tourner un logiciel libre sur un ordinateur. C'est le principe du «
minage », activité qui constitue une source de revenus (en bitcoins)
aussi bien pour des « mineurs » indépendants que pour des coopératives
comme BTCMine au Royaume-Uni ou Btcmp en Allemagne. Lesquelles déploient
de véritables fermes d'ordinateurs ou mini Data Centers.
Autre intérêt : les transactions en bitcoins sont effectuées
directement entre les individus, selon le principe du « peer to peer »
utilisé pour le piratage de la musique ou des vidéos. Enfin, les
échanges sont (presque) anonymes. De quoi en faire rêver plus d'un : le
créateur du bitcoin disposerait ainsi d'un million de bitcoins.
Litecoin, Peercoin, Namecoin... des clones sont alors apparus en
s'appuyant sur le protocole de bitcoin. Avec, toutefois, moins
d'innovation et donc moins de succès.
Autre spécificité : des places de marché électroniques
dédiées se sont constituées pour effectuer des opérations d'achat,
vente, change ou de virement en contrepartie d'une commission de 0,59%.
Cette activité ne pardonne pas les défauts de jeunesse : Bitcoin-central
a ainsi été victime de deux cyberattaques.
« Nous avons tout repensé en termes d'architecture technique et de
processus de façon à offrir une plate-forme très sécurisée », souligne
Gonzague Grandval, PDG de Paymium qui édite cette place créée en 2011.
L'avenir du bitcoin semble néanmoins prometteur car la
cryptodevise réclame peu de commission de change, se fait fi des
frontières et ne recule devant aucune limite de montants... Revers de la
médaille : il convient d'être vigilant quant au stockage des bitcoins
sur son PC ou via un portefeuille électronique en ligne. En perdant leur
mot de passe ou en jetant leur vieux PC, certains ont perdu des
fortunes. Certaines marges des banques menacées
Une fois ces précautions prises, on peut souscrire un
contrat auprès de l'assureur Beauchamp McSpadden ou réserver sa place
pour voyager dans l'espace avec Virgin Atlantic. Les poids lourds
d'e-commerce s'y mettent, comme Zynga (jeux sur Facebook), Overstock.com
(non-alimentaire). eBay envisagerait d'en vendre. Mais, tout est
relatif. Selon Patrick Byrne, PDG d'Overstock.com, ses ventes en
bitcoins ne représenteront que 1% en 2014... Le coup d'accélérateur
pourrait venir de la réglementation.
En Allemagne, le bitcoin est considéré comme une monnaie
privée soumise aux règles fiscales. Autre facteur encourageant son
développement : la mise en place de solutions simplifiant son usage.
« On sent que cette devise pourrait révolutionner le système de
paiement sur le Web. Cependant, il faut instituer des règles pour que
les investisseurs et le grand public aient confiance. Or, si le curseur
est trop haut, l'intérêt du Bitcoin s'évanouit », prévient
Pierre-Antoine Dusoulier, président de Saxo Banque.
« L'adoption par le grand public pourrait menacer les marges des
banques pour lesquelles les virements et les paiements sont des vaches à
lait », constate Philippe Herlin, chercheur en finance, chargé de cours
au Cnam.
En effet, comment pourraient-elles continuer à justifier leurs niveaux de prix ?
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Le crowdfunding déborde la banque de papa
En 1997, le club des fans de Marillion, un groupe rock
britannique, utilise Internet pour collecter un grand nombre de petites
sommes d'argent afin de financer la tournée américaine de ses idoles. Et
ça marche !
En 2001, ArtistShare professionnalise la méthode aux
États-Unis en ouvrant la première plate-forme industrialisée de collecte
pour le financement d'artistes. Très rapidement, le crowdfunding se
segmente : le don pur (donation-based crowdfunding), ou avec
contrepartie en nature (reward-based), le prêt (lending-based) et
l'investissement (equity-based) où on prend une part du capital de
l'entreprise.
Dans le sillage d'ArtistShare, suivent des dizaines d'autres
plates-formes : EquityNet (2005), IndieGoGo (2008) et surtout
Kickstarter en 2009, le leader mondial avec 5,6 millions de donateurs
pour 977 millions de dollars de collecte en faveur de 56000 projets.
Lesquels portent aussi bien sur l'enregistrement d'un CD, la
construction d'un puits au Mali que sur la création de lunettes 3D
immersives.
Pourquoi un tel engouement ? Parce que, avec l'espoir de
financer un projet auquel ils croient, les internautes pallient en masse
la frilosité, réelle ou supposée, des business angels,
capital-risqueurs et banquiers. Un exemple ? En septembre dernier, Yoram
Moyal, cofondateur et président de la start-up Buzcard, a levé en trois
jours sur Anaxago 260.000 euros, après avoir perdu neuf mois avec des
business angels pour seulement 100.000 euros...
En France, Alexandre Boucherot crée en 1998 un des premiers
pure players de la presse sur Internet, Fluctuat.net, racheté par
Doctissimo puis Lagardère :
« Ayant vécu la difficulté à lever des fonds, j'ai fondé Ulule.com
pour financer des projets créatifs, innovants ou solidaires. »
Décliné en six langues, Ulule a ainsi collecté au total 13
millions d'euros pour 3800 projets financés, dont 7 millions en 2013. Il
attend 15 millions cette année. Parmi ses plus beaux succès, 1.083km
(jeans écoconçus fabriqués en France) cherchait 100 précommandes pour
démarrer, soit 10.000 euros.
En fait, il y a eu 997 commandes ! « En plus de l'aspect
financier, le crowdfunding nous a apporté une certaine visibilité,
souligne Thomas Huriez, le dirigeant. Du coup, nous lançons Le
Tricolore, un autre projet dans l'économie circulaire, avec recyclage de
la laine. » Dans ce secteur du don, KissKiss-BankBank (12,3 millions
depuis 2010), MyMajorCompany (13 millions depuis 2007) affichent
également de belles réussites. "Faire de la France un pays pionnier"
Dans l'equity-based crowdfunding hexagonal, les acteurs
comme Anaxago, Finance utile, FundMe.fr, Happy Capital, Smart Angels, ou
Wiseed se frottent les mains.
En septembre dernier, la ministre du Numérique, Fleur Pellerin, avait
esquissé un programme pour « faire de la France le pays pionnier du
financement participatif ».
Encore fallait-il faire sauter certains verrous. Lors de son
voyage aux États-Unis, François Hollande a annoncé devant un parterre
de start-up françaises installées en Californie qu'un projet pourrait
lever jusqu'à 1 million d'euros, comme l'espéraient les professionnels
qui, désormais, ont de quoi arborer un large sourire.
Après avoir levé 25 millions d'euros en 2012, et 33 millions
sur le seul premier semestre de 2013, selon l'Association française de
l'investissement participatif (AFIP), la vingtaine de plates-formes
françaises peut légitimement nourrir l'espoir d'industrialiser son
secteur.
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