mardi 26 mars 2013

42 : l'école gratuite pour développeurs de Xavier Niel

Le patron de Free entend "révolutionner" la formation des informaticiens avec cette école ouverte à tous, gratuite et proposant une méthode basée sur la collaboration mais ne débouchant sur aucun diplôme.
Le constat fait par Xavier Niel est connu de tous les professionnels du secteur. Les entreprises n'arrivent pas à trouver des informaticiens, c'est d'ailleurs le seul secteur en France à souffrir d'une telle pénurie (avec la restauration et le BTP peut-être).
Dans le même temps, les formations universitaires sont en décalage avec les demandes des employeurs. Quant aux écoles privées, elles sont réservées à une frange marginale de la population, à cause de son coût.

"Le système forme des professionnels standardisés. Par ailleurs, 200 000 jeunes sortent chaque année du système sans diplôme. Résultat, la France est au 20e rang sur le numérique, il faut révolutionner l'approche de l'éducation", tonne le patron d'Iliad.

Et de poursuivre : "il s'"agit de proposer une nouvelle voie d'accès au succès, un changement de
paradigme et proposer quelque chose de nouveau, qui ne ressemble pas à une école".
De la parole au faits, le magnant lance donc "42" (en hommage à l'auteur Douglas Adams) , une école 2.0 destinée à former aux métiers de la programmation (développeurs, responsables réseaux, sécurité...) 1000 jeunes par an "qui permettront la création de 10 000 emplois supplémentaires par an", assure Xavier Niel.

Ecole 2.0 

Elle sera pilotée par trois anciens responsables d'Epitech (école d’enseignement et de formation sur l’informatique) : Nicolas Sadirac, Kwame Yamgnane et Florian Bucher.
 
De gauche à droite :  Florian Bucher, Kwame Yamgnane et Xavier Niel

42, c'est d'abord un bâtiment de 4200 m2 ultra-moderne ouvert à Paris dans le XVIIe arrondissement. Connecté, ouvert 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, il sera équipé de 1000 iMac d'Apple dernier cri reliés à un datacenter. Chaque étudiant aura donc à sa disposition un ordinateur.

42, c'est surtout une approche pédagogique qui se veut novatrice. "Les cours académiques n'ont pas de sens au vu des évolutions technologiques", souligne Nicolas Sadirac.
"Il faut intégrer le constat que la connaissance n'a plus d'importance. Puisque toutes les informations sont maintenant disponibles sur internet, ce qui est important c'est de savoir utiliser cette connaissance et d'être actif" 

"Nous allons proposer une pédagogie articulée autour de projets, où les étudiants travaillent ensemble avec des responsables pédagogiques. Chacun sera acteur de sa compétence et de celle des autres, c'est une école peer-to-peer. On passe de l'apprentissage individuel à l'apprentissage collectif, c'est tout le contraire du système classique et c'est aujourd'hui la méthode appliquée par les entreprises", poursuit-il.
Reste que pour IONIS Education Group qui gère les écoles EPITA, Epitech, ETNA... épinglées par Xavier Niel, cette approche n'est pas nouvelle. "Nous sommes heureux de constater que les principes fondamentaux de cette formation ont été créés et mis en place au sein de l'EPITA et d'Epitech depuis très longtemps et qu'ils sont repris dans ce projet, reconnaissance de la modernité pédagogique de nos écoles",k peut on lire dans un communiqué. 

L'idée est également d'être ouvert à tous. Aucune formation initiale n'est requise. "Il s'agit de s'intéresser aux exclus du système scolaire, les talents y sont nombreux", complète Kwame Yamgnane. "Les critères, les diplômes ne nous intéressent pas".

1000 jeunes suivront donc un cursus pendant 3 à 5 ans. Evidemment, ouvert à tous ne veut pas dire que la sélection sera absente. Elle est organisée en deux phases et débute dès aujourd'hui.

Sur le site Web de l'école, les candidats de 18 à 30 ans peuvent postuler à travers un dossier et des mini-jeux qui feront office de premier filtre. 4000 profils seront sélectionnés et convoqués cet été par groupe de 1000 à des séances acharnées de programmation (la piscine). Les 1000 meilleurs seront retenus pour intégrer l'école. La rentrée aura lieu en novembre.

Pas de diplôme 

Autre grande idée de taille : la gratuité. Là encore, pour éviter la sélection par la catégorie socio-professionnelle, très présente dans les grandes écoles et les écoles privées, 42 ne demandera pas de frais de scolarité. De quoi créer des vocations.

L'école est un organisme à but non lucratif financé à 100% par Xavier Niel qui a déjà investi 20 millions d'euros et programmé 50 millions supplémentaires pour les dix premières années. Reste que 42 ne s'interdit pas de nouer des partenariats avec des entreprises. C'est même le modèle souhaité par Xavier Niel. Pour le moment, rien n'a été signé.

Au-delà de l'approche intéressante et philanthropique de 42, le projet pose néanmoins quelques questions. L'absence de diplôme ou de certification en bout de cursus laisse sceptique certains professionnels de la formation. 

"C'est contraire à notre philosophie, les entreprises n'achètent pas un diplôme mais un savoir-faire", rétorque Xavier Niel. C'est une vision un peu anglo-saxonne de la chose car les entreprises françaises restent (c'est triste mais c'est un fait) très attachées aux diplômes. Le label "42" sera-t-il suffisant pour convaincre les employeurs ? Peut-être pas dans un premier temps.

On peut également se poser de la sélection, automatisée dans un premier temps qui excluent toute appréciation personnelle, où la culture générale semble parfaitement absente. Mais cela relève encore de l'approche éducative classique, souligne le magnat.

"Je veux aider la France", lance-t-il. "Mon objectif est véritablement de découvrir de nouveaux talents, de s'ouvrir aux exclus, de faire collaborer et finalement générer de la croissance dans notre pays. Si la France, 5e puissance économique mondiale, tenait sa place dans le numérique, au lieu d’être 20e, elle aurait réglé le problème de l’emploi".

Locaux 42 par 42Born2Code
Sujet: Education

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  • J'espère qu'ils y apprendrons plus de chose qu'à l'Epita et l'Epithec... ayant eu les mêmes profs (plus d'autres)... les cours étaient pas franchement bon, beaucoup de pratique mais une théorie à la rue ce qui ne sert à rien en entreprise vu que la pratique est différente en fonction du poste que l'on trouve.

    Je suis aussi assez sceptique sur le coté iMac... à la rigueur des Ubuntu/Gentoo pourquoi pas, des Windows éventuellement mais des iMac... c'est vraiment pas l'idéale :) Ils vont faire quoi? des applis Apple Store pour augmenter l'offre Free sur les apple TV? vous voyez où je veux en venir?

  • J'espère qu'ils y apprendrons plus de chose qu'à l'Epita et l'Epithec... ayant eu les mêmes profs (plus d'autres)... les cours étaient pas franchement bon, beaucoup de pratique mais une théorie à la rue ce qui ne sert à rien en entreprise vu que la pratique est différente en fonction du poste que l'on trouve.

    Je suis aussi assez sceptique sur le coté iMac... à la rigueur des Ubuntu/Gentoo pourquoi pas, des Windows éventuellement mais des iMac... c'est vraiment pas l'idéale :) Ils vont faire quoi? des applis Apple Store pour augmenter l'offre Free sur les apple TV? vous voyez où je veux en venir?

    • Sans faire passer les Macs sous Windows ou Linux, on peut parfaitement développer et diffuser des applis sous Mac OS sans passer par l'App Store d'Apple, ni plus généralement par l'éco-système Apple.

      On l'ignore souvent, mais les Macs sont des plateformes beaucoup plus ouvertes que les PC sous Windows, et permettent de faire tourner une multitude de logiciels intéressants, gratuits ou payants, dont un bon nombre est issu du monde Unix. La majorité d'entre eux n'est pas disponible sur l'App Store faute de se conformer aux règles imposées par Apple, mais ça n'empêche pas de pouvoir en disposer facilement et d'en profiter.

      On peut même s'offrir le luxe de développer assez simplement en parallèle des versions pour Mac et pour Linux en profitant des possibilités de ces OS, ou encore d'effectuer un rapide portage de l'un à l'autre, tandis que la version équivalente pour Windows exige l'adaptation d'une bonne partie du code, ou le sacrifice de quelques fonctions ou qualités, ou encore l'utilisation d'outils multiplateformes en contrepartie de nombreux inconvénients.

      Cela dit, la possibilité de toucher directement l'écosystème (notamment mobile) d'Apple au travers du Mac constitue certainement une opportunité que le patron de Free et les développeurs de logiciels auraient tort d'écarter.


  • Le choix des iMac reflète bien la réalité. La plupart des startups utilisent des iMac, MacBook... (après tout, c'est un unix like).

    On peut voir le concept de 42 comme une énorme blague (un peu à l'image du roman science-fiction dont il est inspiré). Mais j'espère qu'ils réussiront à créer quelque chose qui fera bouger un tantinet le secteur du numérique.

  • Le choix des iMac reflète bien la réalité. La plupart des startups utilisent des iMac, MacBook... (après tout, c'est un unix like).

    On peut voir le concept de 42 comme une énorme blague (un peu à l'image du roman science-fiction dont il est inspiré). Mais j'espère qu'ils réussiront à créer quelque chose qui fera bouger un tantinet le secteur du numérique.

    • Dans les grandes lignes, la pédagogie de l'école est la même qu'Epitech (pas très étonnant vu que Sadirac a été le créateur d'Epitech).
      La vraie nouveauté tient surtout dans la gratuité et dans la confiance qu'accorderont les entreprises à ce cursus sans diplôme ni reconnaissance étatique.

      Dans tout les cas, je n'ai aucun doute que des gens extrêmement compétents sortiront de cette école.




  • "Le constat fait par Xavier Niel est connu de tous les professionnels du secteur. Les entreprises n'arrivent pas à trouver des informaticiens, c'est d'ailleurs le seul secteur en France à souffrir d'une telle pénurie (avec la restauration et le BTP peut-être)."
    M. CHICHEPORTICHE, c'est absolument HONTEUX et LAMENTABLE de votre part de lire une chose pareille sur ce site.
    Sachez que le chômage des informaticiens est au plus haut en France depuis 2005 (environ 7%), vous êtes bien le seul journaliste de la presse professionnelle à ne pas le savoir...

    • Le chômage des informaticiens est un fait et nous en parlons régulièrement dans ces colonnes.
      Mais les difficultés de recrutement des entreprises est également une réalité, dénoncée régulièrement... Ce sont les recruteurs qui parlent de pénurie, pas moi.

      Cdlt

  • "Ce sont les recruteurs qui parlent de pénurie, pas moi."
    Non justement la formulation que vous utilisez montre que vous en faites une vérité incontestable... c'est bien çà qui est est extrêmement critiquable !
    Les informaticiens sont tout aussi concernés par cette question que les recruteurs, qu'ils soient au chômage ou salariés d'ailleurs, demandez-donc aux syndicats (ex. Munci, Cgt...) ou à Pôle Emploi/Apec ce qu'ils en pensent, vous verrez que ce n'est pas du tout le même son de cloche !
    Quand les recruteurs IT parlent de pénurie d'informaticiens en France, on sait très bien que la raison N°1 est tout simplement qu'ils veulent des profils "à la carte" (moutons à 5 pates...), jeunes et payés des cacahuètes...
    C'est la toute première fois que je lis une telle inepsie à ce sujet sur ZDNet, çà me déçoit énormément.
    Les articles de Christophe Auffray sur l'emploi IT sont bcp plus argumentés et nuancés.
  • En fait, on devrait plutôt dire que les entreprises ont du mal à recruter des informaticiens payés au lance-pierre. Donc il faut trouver des jeunes sortis de l'école, malléables, qui connaissent des technologie plutôt récentes, ce qui évitera aux entreprises de financer des formations.
    Sinon, il n'y a pas de pénurie: les SSII regorgent en ce moment d'informaticiens en intercontrat qui ne demanderaient pas mieux que de se faire embaucher dans de vraies boites, plutôt que de se taper des mission "intermittant du spectacle en mode pompier". Sans compter effectivement les informaticiens au chômage...

  • Bravo ! ça va faire bouger les lignes, et pas que de code. En lisant ce papier, j'ai ressenti de l'émotion. Oui ! J'aurais aimé avoir ce genre d'offre de formation axée sur la passion quand j'ai commencé, au lieu de m'autoformer. C'est intelligent, visible, avec un effet d'entraînement sur les autres acteurs de la formation et, surtout, un retentissement auprès des jeunes.

  • Bravo ! Cette initiative fait bouger les lignes, et pas que de code ! J'ai ressenti de l'émotion en lisant ce papier, oui ! J'aurais aimé avoir une telle formation au lieu d'avoir à m'autoformer. Intelligent de mettre en avant la passion. Et c'est sans doute très positif auprès des jeunes, l'image de Free et de XN via 42 aura un effet sur la perception de nos métiers qui, oui, sont cruciaux pour le développement de notre pays.

  • En 1960 nous étions no2 en informatique juste derrière les Américains, quel recul!
    L'informatique est faite de tas d'emplois différents, et c'est normal que certains soient au chômage dans certaines spécialités, et dans d'autres sont en manque de créatifs ,jeux vidéo, applys smarphones.
    Et on manque de start ups bruts de bruts sur des concepts à inventer.
    Espérons que cette école devienne une couveuse de talents originaux.
  • 7% de chômage et des difficultés à recruter ? Le pb est peut être le salaire. Créer cette école sans barrière de diplôme à l'entrée et sans diplôme à la sorite est peut être une façon de se permettre demain des recrutements moins onéreux qu'aujourd'hui sur le marché. Pourquoi pas mais autant le dire tout de suite.

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